Opalkapaletan

Au cours du colloque intitulé « #Time Word 2019 », Étienne Klein énonce avec éloquence que la compréhension du temps demeure accessible à tous, mais son explication reste énigmatique. Il est concevable pour chacun de visualiser le temps comme un segment de droite horizontale, où le présent se trouve marqué au centre, le passé à gauche et le futur à droite.
Selon Saint-Augustin (354 – 430), le temps s’articule entre le présent du passé, le présent du présent et le présent du futur. Des souvenirs ou des remémorations d’informations, remontent à notre conscience présente, transformant ainsi les souvenirs passés en souvenirs actuels et par conséquent au présent.
Diverses expressions gravitent autour de la notion temporelle : « Le temps s’arrête lorsque rien ne change », « Le temps s’écoule même quand rien ne semble advenir. » Aristote concevait le temps comme un attribut du mouvement, une mesure du changement.
Pour l’artiste plasticien, l’approche visuelle peut évoquer la temporalité à travers une multitude d’icônes représentant montres, pendules, sabliers, schémas et autres symboles.
Dans l’une de mes expositions intitulée « L’esthétique du stigmate : la réception artistique », je présente des photographies réalisées dans les années 2000. Grâce à l’intelligence artificielle, mes images, passées de 8 millions à environ 68 millions de pixels, permettent des impressions en haute définition de 80 cm sur 58 cm. Cette série photographique ne se concentre pas sur l’histoire de l’objet souvent mis au rebut, mais sublime les altérations temporelles, mettant en exergue des stigmates présentés de manière esthétique, une célébration de la matière altérée par le temps.
Michelin Opalka inscrit sur la toile l’empreinte d’un temps irréversible. Sur un fond blanc, il peint en noir les nombres premiers. Ses toiles mesurent 196 sur 135 centimètres. À l’aide d’un micro, il enregistre le chiffre qu’il est en train de peindre. Périodiquement, il se photographie vêtu de la même manière et adoptant la même posture, mettant en évidence son processus de vieillissement. Cette œuvre débuta en 1965. À partir de 1972, il décide de modifier la couleur noire des chiffres en ajoutant 1 % de blanc supplémentaire. En 2008, le noir s’est estompé pour devenir blanc, et il peint alors des chiffres blancs sur les toiles blanches, nommant ce travail « blanc mérité ». Ainsi, les toiles, la voix et le portrait évoquent le flux temporel, exprimant une poésie visuelle. Cette entreprise artistique s’étale sur environ 43 ans.
Dans cette exposition nommée « Opalkapaletan », j’ai voulu réutiliser les principes d’Opalka à des fins esthétiques. N’ayant plus devant moi 43 ans, j’ai dû recourir à d’autres solutions. J’ai restreint la série à 10 toiles, fusionnant le nombre « π » et mon portrait. Concernant le nombre « π », j’ai systématiquement utilisé la même séquence réduite pour des raisons de lisibilité et d’esthétisme. Quant au portrait, j’ai fait appel à l’intelligence artificielle pour générer des images du passé et du futur.
Ces toiles se ressemblent, leurs nuances résident dans les contrastes et les titres. La première est baptisée « instant 1 » et la dernière, « instant 10 ».
Au cours de mon parcours professionnel, j’ai utilisé trois couleurs pour mon identité visuelle : le blanc, le noir et le rouge « #E30613 ». Dans l’enthousiasme du produit de ces couleurs, j’ai voulu reprendre ce schéma en les exaltant : un pur instant de satisfaction personnelle nommé « instant 11 – le vieillard temps ».
Il ne s’agit pas de plagiat, mais plutôt d’une manière poétique d’aborder la notion de temps, à l’instar d’Opalka : un hommage.

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